C’est bientôt l’anniversaire des dix ans du Printemps Arabe et je ne vais pas vous refaire l’historique de la révolution tunisienne et des suivantes en Egypte, Syrie, Libye, etc. La plupart des médias vont s’en charger, faire le bilan, inviter tout plein d’experts pour conclure que l’on doit s’estimer heureux par rapport à nos voisins qui se font bombarder la gueule, qui subissent une dictature ou les deux à la fois.
Dès 2011, la contre-révolution a démarré grâce aux islamistes qui ont changé d’alliés politiques comme de kamis pour se maintenir coûte que coûte au pouvoir. Et ils peuvent compter sur des garnisons d’opportunistes pour s’y maintenir : Nabil Karoui accusé de blanchiment d’argent et de fraude fiscale (actuellement emprisonné) et dont le parti est épinglé par la Cour des Comptes pour financement illicite de sa campagne des présidentielles (tout comme Ennahdha) ; des ex-cadres du RCD (parti de Ben Ali) et un parti d’intégristes beuglards en guise de pasdaran. Un vrai cauchemar. La seule à leur tenir tête ? Abir Moussi, ex-secrétaire générale adjointe chargée de la femme au RCD (oui, encore lui).
Et il ne se passe pas une semaine sans la révélation d’un scandale politique : corruption, conflits d’intérêts, clientélisme, népotisme, détournement de fonds et collusions avec les barons de l’économie parallèle. En gros, la machine politique actuelle, c’est le même système d’exploitation de Ben Ali mais de la nouvelle génération. Le Ben Ali 12 PRO MAX, quoi!
Ah non, on ne s’emmerde pas pendant le confinement, nous. Vu qu’on n’en a pas. On n’en a pas les moyens. La crise sanitaire a donné le coup de grâce à notre économie déjà au fond du gouffre à cause de plusieurs années de gouvernance instable sans modèle économique. Le coût de la vie a explosé : l’état nous écrase en augmentant les taxes et les prix (essence, clopes, eau, électricité, gaz, aliments de base, etc.) sans oublier tous les salauds qui spéculent pendant que d’autres crèvent (on est à plus de 4862 morts au moment où j’écris). Le chef du gouvernement a dit que ça ne sert à rien de maîtriser l’inflation quand le peuple a faim. Mais le peuple, il se barre, le peuple, il se casse ! Le nombre de Tunisiens qui ont débarqué à Lampedusa cette année a quadruplé !
Du côté des droits humains, on sait qu’il n’y aura aucun progrès dans les quatre années à venir vu que notre président, champion de la démagogie, est contre l’abolition de la peine de mort, contre la décriminalisation de l’homosexualité et la consommation de cannabis et contre l’égalité homme-femmes en matière d’héritage.
Concluons sur une note positive : c’est la merde, ok. Mais on peut s’exprimer et la dénoncer. Mais on ne doit pas toucher à la religion (la Constitution de 2014, la loi ainsi que quelques psychopathes qui siègent à l’assemblée nous l’interdisent), à la police ou l’armée (le Code Pénal et de la Justice Militaire nous accuseraient d’attaquer la « dignité, la réputation ou le moral de l’armée »). Allez, tous avec moi : « joyeuzanniversaiire»
Nadia Khiari, dessinatrice de presse